L’Assurance Emprunteur Disruptée ?

L’assurance emprunteur disruptée ? Alors que le Parlement aborde cette semaine en Commission Mixte Paritaire la loi Accélération et simplification de l’action publique, sommes allés à la rencontre d’une spécialiste du risque Sandrine Babin pour comprendre les ressorts d’un marché de 10 milliards d’euros en cours de disruption. Cette assurance qui pèse sur le budget des ménages peut-elle être réinventée ?

Sandrine Babin, qui êtes-vous ?

Je suis Sandrine Babin, Head of Actuarial Sciences chez Assurly (by Gigamesh), une startup indépendante en assurance emprunteur. Je suis surtout actuaire et spécialisée dans la modélisation des risques.

Le marché de l’assurance emprunteur est bousculé ces derniers temps. Quelle est votre vision de l’assurance emprunteur ?

Je pense que le marché arrive à un point de bascule.

Je trouve qu’il n’est pas anodin que le débat autour d’un marché libre agite le Parlement.

En effet, Le 2 octobre 2020, l’Assemblée Nationale a voté l’adoption d’un article instaurant une libéralisation des contrats d’assurance de prêt.

En d’autres termes, il serait bientôt possible de résilier son assurance de prêt à tout moment.

Depuis l’amendement Bourquin en 2018 qui permet la résiliation annuelle à chaque date d’anniversaire, les prix de l’assurance emprunteur ont diminué de 10 % à 40 % pour la plupart des profils. On voit que plus de liberté est bénéfique pour le consommateur. Je trouve que cela n’est pas neutre pour les clients.

Malgré les pratiques dissuasives des bancassureurs qui détiennent 87% de ce marché à fortes marges ( absence de réponse ou réponse tardive à la demande de changement de contrat, etc.), la portée de la réforme Bourquin est donc indéniable.

La réforme a conduit doucement à un alignement des prix des bancassureurs sur ceux proposés par les acteurs alternatifs.

Je considère que la mise en place de la résiliation de l’assurance emprunteur à tout moment ouvrira et libéralisera clairement ce marché pratiquement captif.

Cela  favorisera le consommateur qui aura accès à des tarifs plus attractifs que ceux qui lui sont actuellement proposés.

Quel serait l’impact de la loi ASAP pour les consommateurs ?

Selon moi, il s’agirait d’une avancée considérable en termes de qualité des garanties, au niveau de la transparence et sur les économies réalisées par les clients.

Pour illustrer mon propos, le Comité Consultatif du Secteur Financier (CCSF) a établi en 2015 une liste de 18 critères d’équivalence : les banques pouvant en exiger au maximum 11 au client voulant déléguer ou substituer son assurance de prêt.

En résumé, lorsqu’une personne dépose une demande de crédit et opte pour une assurance différente de celle proposée par sa banque, une liste de 11 critères de couvertures lui est demandée par l’organisme prêteur.

Ainsi, l’assureur alternatif doit donc être en mesure de proposer les couvertures répondant à ces 11 critères.

La situation est similaire dans le cadre de la substitution d’assurance.

Force est de constater que les critères portant sur l’invalidité sont exigés par moins de 50 % des bancassureurs, « la prise en charge de l’invalidité partielle à partir de 33% » demeure peu proposée dans les contrats d’assurance emprunteur  (moins de 25% des contrats groupe l’exigent et donc le couvrent).

La loi Asap ne peut donc qu’être au bénéfique pour la qualité des produits et services mis à disposition des clients.

Les Insurtechs peuvent-elles bousculer ce marché ?

Les acteurs alternatifs affichent des coûts moins importants tant sur les échéances fixes que sur les échéances variables.

Je suis enthousiasmée de voir des acteurs qui vont même proposer des expériences 100% mobile pour faciliter les changements d’assureurs, en quelques minutes seulement. Cela me conforte dans l’idée que faire de l’assurance autrement est possible.

Ainsi, la transparence et la technologie sans faire de compromis sur la qualité et la gestion des risques vont transformer ce marché de dix milliards d’euros dans les prochains mois.

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